10 septembre 2015
Syrie
On ne sait pas si c’est de la pluie, de la neige ou de l’acide
On ne sait pas si la terre se réchauffe ou si elle tremble
On ne sait pas si c’est parce qu’elle a peur de nous
On ne sait pas si l’enfant qui gît dans une rue de Homs aurait été le prochain Picasso, ou le prochain Einstein
On ne sait pas si Al Assad dort bien la nuit
On ne sait pas à quoi ressemblent les cauchemars d’un chien
On ne sait pas grand-chose
On ne sait pas si c’est de la pluie, de la neige ou des tonnes de morphine pulvérisée
On ne sait pas si le téléphone intelligent va faire entendre sa stupide sonnerie kitsch et qu’au bout du fil anachronique, il y aura la voix de l’être aimé ou celle d’une cyber-vendeuse de polices d’assurance
On ne sait pas si quelqu’un viendra pour vrai, en personne, avec ses obsessions, ses phobies, son odeur de transpiration et ses mains
Ses mains divines
On ne sait pas, c’est tout, on ne sait pas…
Si ça va continuer encore longtemps
Si la prochaine crise sera la bonne
Si les bonnes gens vont continuer de plébisciter des tyrans
Si le vin va manquer
On ne sait pas qui colonise nos cerveaux
Qui n’en aura jamais assez
D’or, de pétrole et de jeunes filles en fleur
Qui rêve de contrôler la croissance démographique
Qui voudrait que nous soyons plus productifs à moindre coût
On sait seulement que ce sont les mêmes
Toujours les mêmes qui aspergent ou qui sont aspergés
J’ai le syndrome d’Asperger
Et ça ne se voit pas trop, mais je sais des tas de choses :
Que la terre ne tremble pas pour rien, pas juste pour faire la folle
Que les cauchemars des chiens ne sont pas plus jojos que les miens
Qu’il y a un sens à tout ce non-sens
Que demain n’est pas un autre jour
Que demander l’impossible devient un devoir civique
Par exemple aussi
Je sais qu’elle reviendra
Qu’il sera tard, peut-être trop
Mais qu’elle aura tes yeux
Que la nuit sera longue
On ne sait pas grand-chose
On n’arrive pas à dire ce qu’il faut
Pour changer de dimension
S’arrimer à cette imposture
Marcher sur la terre et trébucher sans avoir à s’excuser
On n’arrive ni à prendre racines ni à hisser les voiles
On n’y arrive tout simplement pas
Et c’est pour ça qu’on persiste et qu’on signe
© Serge Lamothe
12:34 Publié dans Blog, Cinéma, Film, Livre, Voyage, Web | Lien permanent | Commentaires (0)